Travailler l’addiction et ses symptômes, immersion au cœur de La Maison De Kate

Créé en 1994 à Bucy-le-Long dans l’Aisne, La Maison De Kate est un établissement destiné aux personnes souffrantes d’addictions. Le centre accueille hommes et femmes, de 18 à 70 ans, pendant 12 semaines afin de travailler sur leurs rapports aux produits et l’expérience de l’abstinence durant le séjour. L'objectif est d’aider la personne à se libérer de son addiction afin qu'elle retrouve autonomie et libre-arbitre, et de mettre en place les conditions favorables à son projet de vie et de sortie.

C’est Kate Barry, photographe professionnelle et fille de Jane Birkin, qui est à l’origine de la création de ce centre. En effet, après s’être rétablie de sa dépendance dans un centre de traitement au Modèle Minnesota en Angleterre, Kate Barry souhaita proposer cette possibilité thérapeutique en France. Elle nomma alors le centre « Centre de soins APTE (Aide et prévention des toxico-dépendances par l’entraide) ». En 2009, le centre fut confié à l’association Aurore et rebaptisé en 2013 sous le nom de « La Maison De Kate », en hommage à Kate Barry, décédée en décembre de la même année.

Des consommations et des pratiques addictives en forte augmentation

Selon l’observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), les consommations sont en augmentation sur ces dernières années. Les volumes d’alcool vendus entre 2021 et 2022 ont augmenté de près de 2%. Pour le cannabis, sa consommation progresse parmi les groupes les plus âgés tandis qu’il diminue parmi les plus jeunes.

Une forte augmentation des consommations de stimulants, tels que la cocaïne (la deuxième drogue la plus consommée après le cannabis), la MDMA (ecstasy), a été constatée. Entre 1992 et 2023, l’usage actuel de cocaïne a, en effet, été multiplié par dix.

Qu'il s'agisse d'alcool, de stupéfiants, de drogues de synthèse ou de médicaments psychotropes détournés de leur usage… l’augmentation de ces produits s’inscrit dans un contexte de forte disponibilité des drogues sur le territoire. Une situation précaire, un mal-être profond ou l’intégration de traumatismes peuvent amener à développer des pratiques addictives.

Le travail de La Maison De Kate sur les conséquences des consommations

Les personnes souffrant d’addiction présentent la plupart du temps des problématiques liées aux conséquences négatives des consommations : baisse de l’estime de soi, pertes de la maîtrise de soi, de la notion de choix et de la capacité à prendre des décisions…

La dépendance implique également des parcours de vie difficiles avec de la précarité, des problèmes familiaux, ou bien une construction psychologique fragile. Des maladies associées à l’addiction peuvent se développer : troubles anxieux, troubles de la personnalité borderline, infections sexuellement transmissibles, pancréatites, diabète, VIH, hépatites. L’aspect social de la vie des personnes addictes peut aussi être impacté : isolement, problèmes financiers ou d’hébergement, accès ou maintien des droits sociaux…

L’équipe pluridisciplinaire de La Maison De Kate travaille alors sur l’ensemble de ces symptômes et sur leurs conséquences. Cette équipe est composée de divers corps de métiers permettant un accompagnement global de qualité (médecins généralistes, psychiatres, cadres de santé, infirmiers, assistantes sociales, psychologues, sophrologues, éducatrices spécialisées, enseignant d’adaptation physique adaptée, conseillers en addictologie (des personnes au vécu similaire, membre de l’équipe socio-éducative et formés pour accompagner les patients) …

Un centre pionnier dans la méthode de son accompagnement

L’accompagnement proposé au sein de La Maison De Kate s’appuie sur le Modèle Minnesota. Développée aux Etats-Unis au début des années 1950, cette approche considère la dépendance comme une maladie chronique, dont les symptômes sont la perte de contrôle et l’addiction physique.

A La Maison De Kate, les personnes dépendantes sont prises en charge dans leur globalité et aucun traitement de substitution ne leur ai proposé. Le Modèle Minnesota est basé sur la parole, l’écrit, le partage, l’entraide, la confiance et la bienveillance.

On y retrouve des groupes de parole quotidiens, menés par un conseiller en addictologie ou par les patients entre eux, pour mettre des mots sur le parcours de chacun, construire le « récit de vie », identifier les expériences vécues à celles des autres, s’affranchir du sentiment de honte, se soutenir et s’encourager mutuellement.

D’autres groupes thérapeutiques sont animés par l’équipe infirmière sur la compréhension et l’acceptation de la maladie. Les psychologues proposent eux des groupes de psychoéducation, basés sur les mécanismes de l’addiction et sur la prévention de la rechute.

Des entretiens individuels de motivation, un suivi psychologique et un suivi social sont régulièrement organisés pour compléter la prise en charge afin de résoudre les problématiques du patient, qu’elles soient psychologiques ou sociales.

Sont aussi proposés durant le séjour : des séances de sophrologie, des activités physiques adaptées, des groupes à visée éducative et thérapeutique…

L’intégralité de ce programme permet de mieux se connaître, condition indispensable pour pouvoir ensuite modifier certains de ses comportements liés à la dépendance et arriver au maintien d’une abstinence durable. Aujourd’hui encore, La Maison De Kate reste l’un des seuls centres en France mettant en pratique cette méthode. A ce jour, plus de 4 000 patients y ont été accueillis et accompagnés.

Un séjour découpé en différentes phases et une sortie préparée

Le séjour du patient, s’étalant sur 12 semaines, est découpé en 3 phases. La première consiste en un temps d’adaptation et d’intégration. La deuxième est, quant à elle, centrée autour d’un travail intensif sur la dépendance et ses conséquences. Enfin, la dernière phase permet la consolidation du travail thérapeutique en vue de la préparation de la sortie.

La semaine précédant la sortie, le travail est ciblé sur la prévention de la rechute, les stratégies pour faire face aux envies de consommation et le lien avec les associations d’entraide. En effet, afin de poursuivre un parcours de soins sécurisé pour le patient, La Maison De Kate travaille en partenariat avec des communautés, des appartements thérapeutiques, des hébergements médico-sociaux...

Un suivi psychothérapeutique et la participation aux groupes d’entraide (de type Alcooliques anonymes, Narcotiques anonymes, Vie Libre, Entraid’Addicts, …) sont également conseillés aux patients après leur sortie. Ils peuvent les soutenir dans leur démarche d’abstinence et de rétablissement.

« De loin l’un des plus beaux lieux de rétablissement que je connaisse. Tout donner, ne rien garder pour soi et avancer ! Merci pour tout, merci à l’équipe tout entière, vous avez été aux petits oignons.» 

Hélène, ancienne résidente.

« La Maison de Kate c’est une école pour apprendre à mieux vivre. C’est ce que je ressens. Ici, j’ai commencé à apprendre à m’aimer, m’accepter, me regarder, grâce au groupe. Grâce aux gens je pars heureux, fier de moi. J’ai une immense gratitude pour vous, nous, eux, moi. Juste pour aujourd’hui je prends le risque d’oser vivre, d’oser aimer la vie, les gens. Je prends le risque d’accepter les émotions. »

Mathieu, ancien résident.