Accueil > Discussion sur la terrasse avec les patients de l'hôpital de jour Labrador
HDJ_Labrador_confine_Autoportrait

Discussion sur la terrasse avec les patients de l'hôpital de jour Labrador

Les professionnels font preuve d’ingéniosité pour maintenir le lien

L’Hôpital de jour Labrador situé dans le 15 ème arrondissement à Paris accueille une quarantaine de patients souffrants de troubles psychiques. Ces problématiques se manifestent par des angoisses massives, un apragmatisme ou un certain trouble dans la perception de la réalité, l’ensemble de ces éléments ayant fréquemment pour conséquence l’isolement social et familial.

L’hopital de jour s’organise contre l’isolement des patients

A l’heure de la crise sanitaire qui s’impose à tous comme une situation inédite, il était à craindre que ces patients, que tout imprévu déstabilise, soient fragilisés. Du fait de la menace vitale que l’infection fait planer d’une part, mais aussi du fait de la solitude à laquelle la mesure de confinement pouvait les confronter.

Il est donc apparu comme capital que la fermeture soudaine de l’hôpital de jour ne vienne pas rompre les liens tissés entre la structure et le public accueilli, tissage résultant d’un long et persévérant travail quotidien.

Dans ces nouvelles conditions, passé le temps d’adaptation suite au bouleversement causé pour l’ensemble de l’équipe, il a fallu prendre ses marques et faire preuve d’imagination pour mettre en place rapidement les outils nécessaires à la poursuite de l’activité du service. Cette situation nouvelle et imprévisible a imposé à chaque professionnel, engagé dans le soin, de réajuster sa pratique habituelle.

« Les mesures prises pour endiguer la propagation du virus sont allées très vite. J’étais inquiète de ne plus pouvoir suivre nos patients du jour au lendemain. Lorsque ma collègue, Marie, m'a proposé l’idée de la création d’un site pour maintenir le lien avec eux j'ai trouvé que c'était une excellente idée. Au début, je n'étais pas sûre que les patients voudraient ou pourraient adhérer à notre proposition. On peut dire que notre objectif est atteint puisque c’est actuellement deux tiers de nos patients qui passent quotidiennement sur notre site » confie Sandrine Estève ergothérapeute à l’Hôpital de jour du Labrador.

Le site internet : « le Labrador au temps du confinement »

Le site a donc été créé comme le relais de l’HDJ. Lui sont associés des entretiens hebdomadaires par téléphone avec les médecins, infirmiers et psychologues.

Ce site a été conçu en trois parties : une partie blog, une partie forum de discussions et un chat.

Ainsi du lundi au vendredi, les professionnels proposent sur le blog  les ateliers qu’ils avaient pour habitude de faire à l’hôpital de jour avec les patients : écriture à partir d’un court métrage muet, invention d’un texte sonore, échanges de recettes qui renvoient aux souvenirs, création d’une scène printanière à partir de collage, lecture de poèmes rédigés par les talentueux auteurs du Labrador…  Autant de propositions qui donnent à voir la créativité de chacun.

Afin de conserver des repères durant cette période si particulière, les professionnels proposent également une redécouverte de Paris sous un autre angle, à travers les bons plans ou les sorties culturelles virtuelles : concert, cirque, balade dans les villages parisiens…

Accompagner le corps dans le confinement  

La dimension corporelle, si malmenée du fait de l’immobilité à laquelle le confinement oblige, est prise en compte grâce à la méditation, aux auto-massages, aux pas de danses et exercices musculaires que propose la psychomotricienne.

« Le suivi en psychomotricité se fait par l’intermédiaire d’articles que je propose sur le blog ; par mail afin d’axer davantage les propositions en fonction du besoin du patient et par téléphone pour certain afin de garder un lien. Cela ne remplace pas les séances de psychomotricité mais permet néanmoins de maintenir un petit fil conducteur et/ou peut être perçu comme un rappel sur l’importance de rester en relation avec son corps. Certains patients parviennent à se saisir des propositions et en sont contents d’autres non (pour différentes raisons) mais pour la plupart, ce qui ressort de positif est ce lien de continuité des soins que nous essayons de maintenir avec eux. » constate Cécile COREY, psychomotricienne.

 

Le blog : espace d’expression !

En plus des activités proposées par les professionnels, les patients sont invités à proposer eux-mêmes des sujets de discussion ou à partager une anecdote de leur quotidien. En effet, sur le blog, les patients peuvent créer leur propres "discussions" et ne s'en privent pas : "pensées positives du jour", "rions un peu en temps de confinement", "le coin des bons plans"...

 

Pour beaucoup d’entre eux, cet espace virtuel a permis d’exprimer l’angoisse éprouvée face au confinement et la crainte d’être « lâché » alors que l’HDJ ne pouvait plus poursuivre sa mission d’accueil dans les murs.

Cette situation a fait l’objet de nombreux échanges, témoignant d’un réel besoin de continuité et de soutien de la part de l’équipe. Les messages des personnes accueillies peuvent en témoigner :

« Merci à l'équipe pour cette plateforme, et son activité quotidienne, elle m'apporte énormément en attendant un retour à la normale. Reste que l'HDJ commence déjà à me manquer » dit Benoît dès les premiers échanges sur le chat.

« Merci Dr Kellerman, j'ai enfin réussi à me connecter. Avec ce confinement je perds mes repères » témoigne Aline, après avoir été incitée par son médecin à s’inscrire sur le site.

Christophe s’exprime également tant sur ce que lui apporte ce site, que sur les angoisses du confinement : « Ce site est très bien parce qu'on peut communiquer parce que je ne sais pas répondre par mail directement. J’admire les patients comme Fabien et Julie qui sont très imaginatifs dans ce moment de confinement. Je n’ai pas cette imagination en ce moment pour envoyer des blagues ou des choses distrayantes. J’ai tendance à être tétanisé et à être attiré par les actualités, ce qui n’est pas l’idéal pour se détendre. Merci d’avoir ouvert ce site. A bientôt »

Maintenir le lien via l’échange en ligne

Un chat prévu par la plateforme permet aussi de parler du quotidien et de maintenir un lien entre les soignants et les patients. Les échanges informels retrouvent place dans ce cadre et la solitude s’estompe le temps de cette connexion.

« Hier, une patiente a partagé une photo de sa première sortie depuis le début du confinement. Elle portait son masque et en était assez fière. Le forum et le tchat remportent un certain succès auprès de nos patients. Il nous arrive parfois de les relancer sur certains sujets ou de les rassurer sur les conséquences du virus. Mais globalement les discussions suivent leur cours sans qu’il soit nécessaire pour nous d’intervenir. » explique Marie Michelin, ergothérapeute à l’HDJ.

Pour les personnes n’ayant pas accès à cet espace virtuel, des propositions d’activités personnalisées sont régulièrement envoyées par les ergothérapeutes et la psychomotricienne, par téléphone ou par mail.

« Certains d’entre eux n’arrivent pas toujours à se connecter à la plateforme soit pour des raisons techniques soit du fait de leur apragmatisme. Même si tous ne se connectent pas à la plateforme, tous les patients sont suivis par les médecins et personnels soignants de l’hôpital de jour ou le Centre Médico Psychologique qui les accompagne habituellement. Personne ne se retrouve seul face à lui-même. » rappelle Anne Le Clanche, assistante de service social de l’HDJ.

La toile un moyen de communication en vogue pour l’HDJ 

La toile est un moyen de communication qui joue un rôle salvateur pour les patients à l’HDJ dans la situation actuelle.

En outre, ce panel de propositions virtuelles reprend les étayages qui servent de piliers au fonctionnement de l’hôpital de jour. Même à distance, un lien thérapeutique est maintenu et il permet de continuer les prises en charge et le soutien à l’ensemble des patients. Ainsi, les missions essentielles et primordiales de l’hôpital de jour, à savoir la lutte contre l’isolement et la rupture des liens sociaux qui touchent particulièrement la population souffrant de troubles psychiques, restent assurées.